A L uneACTUALITESOn en parle

CONTRAT DES CHANTIERS DE RÉPARATION NAVALE : Dakarnave, les 8 points d’un carnage financier

L’Inspection générale d’Etat (Ige), la Cour des comptes et un audit indépendant sont tous arrivés à la même conclusion : le contrat signé par l’Etat du Sénégal et Lisenave, qui a été prolongé de 8 mois après son expiration ce 24 juin est un carnage financier.

Libération révélait hier que le contrat des chantiers de réparation navale liant, depuis 25 ans, l’Etat aux Portugais de Dakar, a expiré ce 24 juin. Mais, faute de repreneur, ce contrat a été prolongé de 8 mois pour «préparer la transition». La logique voudrait que Lisenave plie bagage le même jour en plus d’une suite aux révélations faites par des missions de l’Ige, de la Cour des comptes et d’un cabinet indépendant. Ce contrat est plus qu’un carnage financier comme l’atteste des éléments clés issus des mis‐ sions d’audit. Premièrement : le contrat contient une disposition qui stipule, qu’au terme de celui‐ci, « Dakarnave devra être remboursé de tous ses investisse‐ ments ». En clair, à la fin de la concession, l’Etat va « retourner » à la société portugaise tout ce qu’elle prétend avoir investi. Deuxièmement : sur la base de ce fameux contrat, la Sirn a mis, depuis 25 ans, à la disposition de Dakarnave, 24 appartements pour le logement de ses cadres pour la même durée du contrat de concession. Ces appartements qui se situent en plein centre‐ville (Calmette et Pinet Laprade) sont loués entre… 60.000 et 80.000 Fcfa.

Or, dans cette zone le prix locatif d’un appartement tourne au moins entre 500 et 600.000 Fcfa. Le préjudice subi par la Sirn est estimé à 2,428 milliards de Fcfa. Troisièmement : il été établi formellement que Dakarnave n’a respecté aucun engagement de son contrat : les installations sont laissées en situation désas‐ treuses, la formation promise inexistante, les bateaux sénégalais sont laissés en rade et le matériel investi n’a jamais été renouvelé. Au lieu de prendre en charge la réparation et d’al‐ ler vers la modernisation de nos installations navales comme sti‐ pulé dans le contrat, Dakarnave a préféré faire de la sous‐trai‐ tance sa maison mère, Lisnave. Les pièces des bateaux sont en‐ voyées au Portugal pour être réparées et retournées par… avion à Dakar. Quatrièmement : dans le cadre de l’exécution de la concession de l’exploitation des infrastructures à Dakarnave, les apports de la Sirn s’établissent à 16.515.179.629 Fcfa composés des infrastructures objets de la concession (9.397.179.629 Fcfa) et de l’investissement apporté pour leur réhabilitation (7.120.000.000 Fcfa). Or, les ap ports de Lisnave sont exclusivement le capital de Dakarnave d’un montant de 1.727.000.000 Fcfa composé par une partie issue directement de fonds propres (221.000.000 Fcfa) et des augmentations de capital dont les origines pourraient provenir des produits de l’exploitation pour un cumul de 1.506.000.000 Fcfa.

Pire, l’activité concédée a généré entre 1999 et 2020 des ressources à hauteur de 202.386.612.983 Fcfa. Cinquièmement : une analyse contributions/ressources a été faite sur les périodes de 2007 à 2014 et de 2016 à 2020 sur la base des états financiers de Dakarnave retrouvés au niveau de la Sirn. Elle a permis de constater les quotes parts contribu‐ tions et ressources des parties : Etat du Sénégal : quote‐part contribution 76 pour cent et quote‐part ressources 2 pour cent ; Sirn : quote‐part contribution 76 pour cent et quote‐part ressources 6 pour cent ; Lisnave : quote‐part contribution 8 pouccent et quote‐part ressources 46 pour cent. Sur ces périodes, l’analyse contribution/ re source a permis d’établir que les ressources récupérées par l’Etat représentent 0,9 fois de ses apports ; celles de la Sirn 0,5 fois de ses apports alors que Lisnave brassait 40,2 fois ses apports.

En résumé : 97 pour cent des sommes récoltées dans le cadre de la concession sont allées dans les poches des Portu‐ gais. Sixièmement : L’analyse de la redevance fixe avait permis de montrer que le ridicule mon‐ tant annuel de 62 millions de Fcfa, fixé par le cahier des charges, ne couvrait pas le coût des charges d’exploitation et la taxe d’occupation domaniale de la Sirn. Septièmement : Dakarnave a obtenu le statut d’entreprise franche d’exportation (efe). Ce statut a été octroyé de façon totalement non conforme avec les dispositions légale de l’Etat du Sénégal et du concessionnaire car n’ayant aucun effet ressenti sur sa compétitive à l’export. Il par contre eu pour effet de déséquilibrer le partage des ressources générées. De façon non exhaustive, il y a un manque à gagner de 7,755 milliards de Fcfa pour l’Etat. Huitièmement : il est clair que la prolongation de ce contrat, même pour une semaine, était à éviter.

                                                               CMG

Laisser un commentaire